Ville et transhumanisme

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0 Commentaires 24 sept, 2015 Innovation technologique, Smart city , , , , , , , ,

Le visage de la Ville de demain ?

 

Les technosciences qui croisent à la fois le développement des technologies émergentes et les évolutions scientifiques sont neutres à la base, sans connotations directes et idéologies marquantes. L’émergence des grandes métropoles qui s’articulent autour de la thématique des « smart cities » et du développement durable va profondément faire évoluer les modèles urbains et les manières d’appréhender la ville dans le quotidien des habitants. L’avènement de la fée électricité au XIXème siècle avait déjà totalement modifié l’espace urbain, son vécu et sa visibilité.

 

L’enjeu pour la ville de demain se centrera autour des usages ; ce sont le choix des usages qui feront que la ville deviendra une ville sensible et durable ou au contraire une ville coercitive organisée autour des technologies de contrôle et de surveillance. La « smart city » est avant tout un projet politique, social et culturel.

 

Face à la technologie, liberté VS asservissement ?

 

La ville cybernétique, coupole technologique basée sur le paradigme numérique et régie par les algorithmes, représente un nouveau système technique qui permettra sans aucun doute d’optimiser la gestion de la ville sous tous ses aspects, comme avec la mise à disposition de services innovants pour les citadins ou encore le développement durable.

A cette image positive et efficiente s’oppose une autre image de la ville : celle de la vidéosurveillance, de la géolocalisation de l’individu, du contrôle des flux d’information où le citadin en situation de mobilité pourrait finalement perdre son autonomie. A la ville dite « intelligente », nous y oppose, et nous ne sommes pas les seuls, la notion de « ville collaborative » construite autour de « l’intelligence de la ville », c’est-à-dire celle co-construite par un citadin éclairé qui s’empare des technologies numériques pour créer, partager, innover et contribuer lui-même à cette ville. L’émergence de lieux hybrides comme les espaces de coworking, fablab, makerspace, médiathèque 3ème lieu, tous basés sur la question des biens communs, reflètent la tendance actuelle du recours aux technologies à dimension humaine et porteuses de valeurs dans la ville.

 

Une ville transhumaniste : « surhumain » ou « plus humain » ?

 

Ni l’un ni l’autre ; l’enjeu est plus profond et correspond à une autre conception de l’homme qui fusionne avec les technologies et devient post-humain, un humain connecté, augmenté, mais aussi contrôlé et finalement très normé et stéréotypé.

 

La ville transhumaniste est celle du cyborg : l’homme futur hybridé avec les technosciences où l’on ne sait plus ce qui relève de l’ordre de l’artifice ou du biologique (l’écrivain Philip K .Dick dans de nombreux romans et nouvelles avait déjà décrit cet espace urbain dès les années 1970). Le développement asymptotique des sciences aujourd’hui va sans aucun doute impacter l’espace urbain et la société. Les biotechnologies, nanotechnologies, la génétique, l’intelligence artificielle, la biologie de synthèse, la domotique et la robotique, autant de champs d’expérimentation dont on ne connaît pas encore les effets sur le vécu de la ville et de ses habitants. Le citoyen n’aura pas nécessairement conscience de la présence et des effets de ces technologies invisibles et ubiquitaires.

 

A contrario, la première ligne de chemin de fer pour voyageurs entre Paris et Orléans en 1843 ou l’avènement de la photographie en 1835 ont mis à jour des techniques nouvelles dont chaque citadin pouvait voir concrètement les effets dans l’espace urbain. Ainsi, le cyborg urbain équipé de lentilles connectés ou génétiquement modifié pour voir la nuit, recevant des flux d’information émanant de systèmes algorithmiques automatiques sans aucune intervention humaine se promènera sur une avenue éclairée d’arbres bioluminescents. Cette situation pose nécessairement des questions éthiques, juridiques et donc politiques.

 

Pour nous, les technologies doivent humaniser, favoriser le lien social, la proximité. La ville transhumaniste doit donc pouvoir être plus humaine. Encore faut-il que nous maitrisions la dynamique afin d’empêcher les multinationales comme Google animées d’un vrai projet politique de prendre le pouvoir sur nos vies.

 

Cet article a été publié dans le journal municipal d’Issy les Moulineaux en vue d’une conférence que Pascal Desfarges animera dans le cadre du cycle « Futur@venir » de la ville d’Issy le 21 janvier prochain, à 20h, à la salle multimédia de l’Hotel de Ville. 


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